...que tout ira bien.
La nuit était transparente. L'humidité disputait à la poussière la primauté de flotter dans l'air frais. Je n'étais que secousses et tressauts, tremblant dans la pénombre, attendant le retour de ma respiration apaisée. Comme chaque nuit où le sommeil me manque, je sais que je vais remuer le goudron cérébral. Je me rappelle alors, nostalgique, des bras de mes parents. "Ca va aller, ne t'en fais pas." Comment ont-ils pu me promettre ça ?
Etait-ce l'ultime aveuglement que les années 80 finissantes, avec leur cortège d'iconoclasmes, parvenaient à entretenir ? Famille, religion, société, économie, politique, psychologie, sentiments, corps : que leur restait-il encore à abattre, mais aussi à saisir pour croire en l'avenir et m'assurer que tout irait bien ?
Ne vas pas croire que j'accuse. Pouvaient-ils ... Si, j'accuse ceux qui ont des certitudes. Et qui mentent en promettant que tout ira bien. Que croyaient-ils ? Que ça allait s'arranger ?
Je sais que sans optimisme, on ne va nulle part. Mais est-on vraiment allé quelque part, sans mentir ?Jusqu'où sommes nous prêts à promettre pour se désangoisser de l'avenir ? Jusqu'où nous croyons-nous maîtres de notre destin ? Jusqu'où le sommes-nous vraiment ? (Je ramasse les copies dans quatre heures.)
Tout cela va très loin, malgré tout. En amour, après avoir vu tout ce qu'on a vu, écouté, ressenti, cru et compris, peut-on encore dire "je t'aimerai toujours" ? Peut-on encore croire que l'on saura/voudra se battre contre vents et marées simplement parce que, à l'instant où l'on pense "je t'aimerai toujours", le sentiments amoureux, fort, immanent, inéluctable, fait paraître cette promesse comme une évidence et donne une confiance absolue en les capacités du couple à traverser le temps ? Je ne demande rien. Mais je ne promettrai rien.