La Ligne Droite, un scénario original de Régis Wargnier, nous parle de Yannick. Yannick est jeune, beau, sportif de haut niveau, sensible. Mais après un accident, Yannick a perdu la vue. Comment courir, alors ? Comment avancer dans l'absent, dans ce plein qui, tel quel, ne ressemble plus à rien, n'est plus aussi simple qu'avant ? Après plusieurs essais, Yannick est sur le point d'abandonner l'athlétisme, à contre coeur. Voilà qu'à l'issue d'une énième dispute avec son entraîneur, il parle, dans la cafeteria, avec Leila. Leila, distante, un peu échaudée, lui répond. Elle voit un beau défi dans le service qu'il lui demande : l'aider à courir de nouveau. Gagnant la confiance du jeune homme, puis de sa mère, qui veille toujours, et de l'entraîneur, sage, Leila s'intègre à merveille. Et puis, tout bascule. Elle révèle enfin son douloureux passé, l'accident passionnel, la prison, son fils qui lui manque, la peur d'être reconnue. Yannick se sent floué, sa mère la rejette, les ponts sont coupés ... et pourtant, pas totalement. L'histoire de Yannick et Leila est une belle histoire, d'amour et de rejet, de confiance et de défi, sur fond de dépassement de soi, sans complaisance, sans pathos. C'est sans doute ça, la richesse de ce film : traiter le handicap sans scène larmoyante, sans en faire des tonnes : Yannick est un type comme les autres, et s'en prend plein la gueule quand il me mérite ("Ton handicap ne te donne pas tous les droits"). Quid de Leila ? Wargnier a rassemblé deux destins-type scénaristiques, le handicap soudain et la sortie de prison, le tout réuni dans une histoire de dépassement de soi. Ca ne peut, évidemment, qu'être brillant et émouvant, quand c'est bien traité.
Leila, c'est Rachida Brakni, qu'on avait déjà vue dans l'excellent Chaos et l'hilarant Neuilly-sa-mère !. Je ne peux rien te dire à son sujet qui soit objectif : je l'aime d'amour, Rachida. Yannick, c'est le jeune et percutant Cyril Descours, nommé aux Révélations des derniers Césars, extra dans Français pour débutants, sexy dans Une petite zone de turbulences. Le duo ne souffre pas de la différence d'expérience ciné ou de la différence d'âge. Ils forment, tous les deux, un duo efficace parce que sans a priori, sans parti pris, sinon la création d'une relation qui fonctionne dès le départ, chacun dans son personnage. Sur le reste du casting, outre quelques pointures de l'athmétisme, on trouve Clémentine Célarié, sortie de ses comédies hilaroïdes depuis un moment, qui donne à la mère de Yannick une ampleur efficace : détestable, castratrice, envahissante, surprotectrice (aux yeux de Yannick), comme dans cet extrait. A ses côtés, Thierry Godard, l'entraîneur, parvient à créer à lui seul le climat viril et pesant du milieu sportif où évolue Yannick. En parallèle, Grégory Gadebois, qu'on a vu récemment dans Angèle et Tony, élabore la même pression virile et lourde de la famille sur le chemin difficile de Leila.
Pour le plaisir (et te donner envie), un instant d'une parfaite poésie, beauté de l'image exceptionnelle, jubilatoire, ...