"Bonne fête Papa !"
Ce qui différencie l'homme du père, c'est l'enfant. Un homme qui a un enfant, c'est un père. Biologique, adoptif, de substitution, ou générateur d'affection. Un homme, un enfant. Les liens
qui existent entre le père et l'enfant sont donc variés : génétiques, affectifs, émotionnels, psychologiques, physiques, familiaux, publics... La paternité et la filiation sont deux concepts
aussi immanents que dictés par l'habitus social ; ce qui représente une toute autre pression : quand on se sent un père (affectueux / perdu / présent / ce que tu veux) par nature, doit-on se
conformer à l'image publique du père - c-à-d celle de l'opinion ? Là est toute la question : qu'est-ce qu'un bon père ?
Le Québecois Ken Scott est le co-scénariste et
réalisateur de Starbuck, une comédie vraiment bien menée sur la question de la paternité. David Wozniak, la quarantaine, réalise en peu de temps qu'il va être papa
... et qu'il l'est déjà. Et pas qu'un peu : suite au zèle d'une banque de sperme à laquelle il a pas mal donné pour un peu d'argent dans sa jeunesse, il se retrouve papa de 533 enfants, dont 142
veulent le retrouver. Il découvre alors Etienne, serveur voulant être acteur, Julie, au bord du burn out, Raphaël, l'handicapé, Riccardo, la star du foot, et tout un tas d'autres,
du gothique au geek, de la nymphette à la végétarienne. Il se passionne pour ces enfants qui ont un peu de lui, ce qui le panique et le rassure quant au petit qui pousse au creux de
Valérie (et celui-là, il l'a planté lui-même !). Entre la découverte de ces jeunes qui ont souvent grandi sans père, le bébé qui se prépare et qui aura besoin de lui (à la régulière !) et
ses propres considérations de la paternité (en tant que fils), David se retrouve dans une histoire pas banale... qui questionne la paternité avec beaucoup de tendresse. Et d'humour.
Vu en bonne compagnie (grâce à CinéFriends !), je peux t'assurer qu'il ne faut pas louper ce film. L'histoire est drôle, les questions soulevées
sont intéressantes, les dialogues sont ciselés, les acteurs sont très justes et la réalisation (photo, montage, tout ça) en fait un film qui te tient en haleine.
Alors, Wozniak est-il un bon père ? Entre l'ange gardien et le rechignement, entre l'amour vrai et le socialement induit, entre tous ces gamins qui sont de lui sans être par lui et ce futur gamin
qui sera vraiment le sien, entre ce qu'un père attend d'un fils et ce qu'un fils attend d'un père, Wozniak en arrive à la conclusion suivante : d'un côté il y a les gènes, la biologie, le concret
; de l'autre, il y a le sentiment, l'appartenance, la psychologie. Et si le premier implique le second, la nature des seconds peut invalider le premier.
Papa, je te souhaiterais bien ta fête, mais il semble que tu sois aveugle, sourd et muet quand il s'agit de moi. Après des années de violences et de mépris sans que je ne
comprenne pourquoi, je ne suis plus qu'un prénom et tu n'es plus qu'un concept. Pourquoi un prénom fêterait-il un concept ? Ca n'a pas de sens.