ILS REVIENNENT !
Non, pas les Parisiens à la Baule, pas les requins en Australie, pas les marronniers d'été des grandes chaînes, ni les fournitures scolaires, non. Pour la 4e fois en 10 ans, c'est le nouveau grand retour de l'AAADT à Paris. De ?
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# Contexte
La Culture va mal, depuis toujours, mais elle va bien, depuis toujours. Comme le disait ce célèbre philosophe français, "C'est une question d'équilibre". Alors que les théâtres publics se débattent avec leur programmation dans un climat de baisse des subventions assez drastique, les programmateurs privés s'en donnent à coeur joie. Depuis 2005, Les Etés de la Danse émerveillent Parisiens et touristes en juillet et août, grâce à une programmation internationale éclatante (et de photos extraordinaires dans le métro), financée à grands renforts de mécénat. Forcément.
En 2014, pour la 10e édition du festival, on pouvait grâce à eux s'extasier devant le Ballet de San Francisco. 9 ans après que ledit Ballet en a honoré la première édition, en 2005. Deux fois en 10 ans, y'avait de quoi trouver que ça manquait un peu de panache. Et bien pour la 11e édition, le festival fait revenir pour la QUATRIEME fois ce qui va devenir sa compagnie fétiche : l'Alvin Ailey American Dance Theater (ou AAADT). 2006, 2009, 2012, 2015 : tous les 3 ans, remarquable régularité.
# Instant Souvenir
J'y étais allé en 2006 (avant l'ouverture de ce blog), et le programme était top : le sublime Solo de Hans van Manen sur la Suite n°1 en ré mineur de J.S.Bach, le fascinant Caught de David Parsons, où le danseur vole, à coups de sauts et de stroboscope, et l'épique Revelations d'Alvin Ailey, où l'histoire se mêle à la foi, à ce qui nous dépasse, à l'éternel, la danse extraordinaire et les negro spirituals en outils d'extraction vers le divin. J'en étais sorti impressionné. Je t'en avais même parlé en 2009, sans y être allé, juste parce que je savais que ça te plairait. En 2012, j'avais plutôt assisté à l'inégale performance des co-listiers de l'AAADT, la PTDC, dont je n'avais retiré de plaisir que durant Beloved Renegade.
# Les faits, rien que les faits
Jusqu'au premier août, les Etés de la Danse programment donc l'AAADT au Théâtre du Châtelet pour 27 représentations, avec un programme changeant alliant au génie Ailey, selon les soirs, du Bill T. Jones, du Christopher Wheeldon, du Ohad Naharin, du Hans van Manen, entre autres.
Ce 13 juillet, la compagnie était en grande forme : technique irréprochable, alliant souplesse, puissance, précision, fluidité, écoute, résonnance. C'est ce qui fait l'immense talent de la compagnie : des interprètes au sommet de leur art, la danse servie par ses plus ardents amoureux. Au programme, par contre, du très bon et du transparent.
- Avec sa mise en scène en clair-obscur, LIFT, d'Aszure Barton, est une jolie variation rythmique, où les partitions masculines et féminines se croisent et se complètent, l'esthétique tribale apportant force et spiritualité à l'ensemble.
- Awassa Astrige/Ostrich, d'Asadata Dafora, m'a laissé froid. La danse du poulet (enfin, de l'autruche, j'imagine) s'accroche certainement à une référence culturelle qui m'échappe. Toujours est-il que ce petit solo de quelques minutes, dans un contexte de menagerie, dans un ensemble coherent, aurait été plus agreeable à suivre que perdu au milieu de pieces de danse remarquables.
- Remarquables, sauf Bad blood, de Ulysses Dove, qui m'a fait pensé à un spectacle de fin d'année de cours de jazz : de la musique années 80 aux costumes en lycra moulant en passant par une chorégraphie purement performative et récitative, sans émotion, la soirée s’étirait soudain avec ennui…
- C’était sans compter sur un final extravagant : pour finir en beauté, la compagnie nous a gratifié d'une de mes pièces favorites d'Ohad Naharin, Minus 16. Les mots me manquent, mais va le voir : drôle, physique, délicat, varié, festif, communicatif... Extra.
Tu veux le voir ? Presse-toi : la dernière représentation de cette édition aura lieu le 1er août. Et pour choisir des chorégraphies préférées, creuse un peu le programme disponible ici.